Elena l'attendait dans une Seat Cordoba blanche.
- A l'hôtel, dit-il après avoir pris place à ses côtés.
Elle conduisit calmement jusqu'au Patio de la Cartuja, sans lui poser la moindre question. Il n'aurait pas aimé qu'il en fut autrement. Devant l'hôtel, elle lui tendit les clefs d'une autre voiture.
- Fiat Tempra bleue, juste devant, fit-elle.
Il prit les clefs, descendit de la voiture et entra dans l'hôtel. Ses affaires étaient déjà prêtes mais il ne quitterait pas officiellement le Patio de la Cartuja. La police allait certainement demander les noms de toutes les personnes ayant quitté les hôtels de la ville aujourd'hui pour les recouper avec ceux des voyageurs arrivés par avion depuis quelques jours. Il prit une douche, mit de nouveaux vêtements achetés la veille de son arrivée, alluma un nouveau téléphone et sortit. Il ne reviendrait pas. Les employés découvriraient des affaires abandonnées le jour où il aurait dû quitter l'hôtel. Les papiers avec lesquels il était entré dans le pays avaient été brûlés la veille. Il s'installa au volant de la Fiat Tempra garée dans la rue du Patio. Il pesta contre Elena car c'était un mauvais emplacement, un employé de l'hôtel aurait pu remarquer le modèle de la voiture. Son nouveau téléphone vibra au fond de sa poche. Une seule personne connaissait ce numéro.
- Oui Elena ?
- Ce n'était pas Lazzarini.
- Quoi ?
- Ce n'était pas Lazzarini. Tu dois venir à l'appartement. Maintenant.
- Quel appartement ?
- A Triana. Vite.
Elle coupa. Il posa la tête sur le siège. C'était Lazzarini. Forcément. Il ne voulait pas passer par leur appartement de Triana. Il devait démarrer et aller au Portugal prendre un avion pour Paris, comme prévu. Il gara la voiture près du pont Isabel II et fit le reste du trajet à pied. Le Guadalquivir semblait toujours aussi immobile et la Calle Betis s'animait en cette fin de matinée. Le bar où il avait rencontré Elena la première fois venait d'ouvrir, le même serveur était en train de placer les tables et les chaises sur la terrasse. Il ne s'arrêta pas et rejoignit Triana d'un bon pas. Il arriva devant l'immeuble, vérifia que son Glock était en position dans son holster dorsal et entra. Il prit l'escalier jusqu'au troisième étage et frappa à la porte de l'appartement dans lequel il était deux jours plus tôt. Elena lui ouvrit aussitôt et le laissa passer. Il avança jusqu'à la fenêtre et regarda dans la rue puis se tourna vers elle.
- Raconte-moi.
Elle s'approcha de lui et regarda aussi par la fenêtre. Il fit comme elle et comprit trop tard son erreur. Il sentit le canon de l'arme sur sa nuque juste avant d'en entendre le bruit. Il s'écroula sur le dos et vit celle qui ne lui avait jamais adressé la parole le regarder en souriant, l'arme à la main. Sa dernière pensée fut qu'il ne savait même pas comment elle s'appelait.