mardi 14 février 2012

L'approche

Il vit Lazzarini descendre de l'avion et prendre place directement à l'arrière d'une Maibach qui attendait sur le tarmac. Elena se tenait près de lui, en silence.
- J'ai besoin d'une voiture, dit-il. La plus passe partout possible, Seat, Peugeot, peu importe, grise, pas trop neuve, par trop vieille. Pas de location, pas une volée non plus bien sûr.
- Tu l'auras cet après-midi. Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?
- Je rentre à l'hôtel.
Il attendit dans sa chambre que la nuit tombe. Il visualisa mentalement son approche même s'il savait que dans la réalité de l'action, rien ou presque ne se passerait exactement comme il l'avait envisagé. Néanmoins, l'exercice mental de la visualisation lui permettait d'être prêt au bon moment. Il se repassa le film de ce qui ne serait pas, une bonne centaine de fois. Il sortit peu après deux heures du matin et marcha jusqu'au centre ville. Séville n'est jamais complètement déserte même au milieu de la nuit. Il passa près d'un homme promenant un chien et dépassa un couple visiblement ivre. Devant un vieux bâtiment trois jeunes types le regardèrent avec insistance mais il refusa de croiser leur regard, il avait autre chose faire ce soir que risquer une démonstration de son art du combat à mains nus. Il arriva devant l'immeuble dans lequel Lazzarini était censé dormir. Troisième étage, aucune lumière. Il s'engouffra dans l'immeuble d'en face, grimpa au troisième et entra dans l'appartement plongé dans le noir. Il n'alluma aucune lumière et se dirigea directement vers la fenêtre. Au pied, la caisse en bois l'attendait. Il l'ouvrit et commença l'assemblage. Chaque élément s'ajustait. Il aimait ce moment. Il lui fallut moins de cinq minutes pour que l'arme soit prête. Il avait encore au moins trois heures à attendre.
La lumière du jour envahissait peu à peu la pièce. Il était en place, le rideau légèrement décalé par rapport à l'axe de la fenêtre. Il avait découpé un morceau de la vitre. A l'heure prévue le rideau de la fenêtre d'en face s'ouvrit. Il avait une vue parfaite sur le salon. Il voyait trois hommes assis autour d'une table noire. L'un d'entre eux était Giovanni Lazzarini. Il appuya sur la détente. La balle perfora la vitre et vint se loger dans l'arrière du crâne de sa cible. Il s'assura que celle-ci, après un très court instant, s'effondre sur la table de son petit-déjeuner. Il démonta l'arme au plus vite, essuya les traces et sortit.


lundi 6 février 2012

La cible

Giovanni Lazzarini ne voulait pas aller à Séville mais il n'avait pas vraiment le choix. Kolkharov avait été très clair : "si tu veux continuer de travailler, tu viens". Il avait soupiré et fait préparer le Learjet qu'il partageait avec ISC la société de son partenaire. En réalité le Learjet appartenait intégralement à ISC, Lazzarini n'avait rien à lui "officiellement". Tout était au nom de Svensson. Son partenaire.
Lazzarini n'aimait pas voyager. Il préférait rester dans sa maison de Lugano à gérer ses affaires à partir de quelques ordinateurs et téléphones. Il était dans la partie depuis si longtemps qu'il avait de l'expérience à revendre. Il vendait des armes depuis l'âge de quinze ans. Au début il servait de coursier pour des hommes de la 'Ndrangheta, livrant à la demande des pistolets aux numéros limés. Aujourd'hui loin de la Calabre, il avait pour clients des chefs d'Etats, des potentats locaux et des révolutionnaires ayant un peu les moyens de leurs ambitions. Il faisait attention à ne pas froisser les susceptibilités de ses différents acheteurs mais il lui arrivait de vendre à deux camps opposés sans qu'aucun ne sache vraiment à qui il achetait.
Kolkharov était l'un de ses hommes-clés pour le matériel russe, il devait donc prendre en compte ses atermoiements. Il irait à Séville mais pas tout seul.
- Oui ?
Anja répondit à la première sonnerie, écouta Lazzarini puis lui dit : "Je t'envoie Paul et Adam. Ils seront chez toi ce soir et ne te quitteront plus jusqu'à ton retour en Suisse."